Douze coups de minuit

Douze coups de minuit. Le long du quai, la brume, le froid, l’ennui. Un cri, un appel, nos corps transis. Une odeur rance, entêtante, caramélisée. Le silence quelques bruits étouffés. Des ombres qui se forment, se déforment. Nos pas progressant doucement. Sur l’eau l’onde de remous. Émergeant de la vase en dessous. Des bulles, un sort qui monte vers le ciel. Encens de nos promesses artificielles. Exportant des vœux aux messages bien frileux. Main dans la main. Les yeux dans les yeux. Amoureux ou malheureux ? En ayant froid, toi plus que moi. Notre bal, mystérieux, infernal. La parité notre inégalité. Scellant la force de nos écorces. Que seules tes larmes peuvent transpercer. Laissant sur ma peau la rouille de tes maux. Corrodant les entrailles de nos misères. Suintant altières. Alors que vacille une flamme sur le squelette de nos fossiles. Cette nuit, je te sens inaccessible. Ma remarque est futile. De tes rancœurs, je ne suis qu’un fusible. Malhabile pour retrouver son équilibre. Prisonnier ou libre ? Le long du quai, la brume, le froid, l’ennui. Notre avenir en mode rétréci. S’enfonce peu à peu dans le néant. Sans penser à ce qu’il trouvera en sortant. Le veut-on vraiment ? J’en doute. Les certitudes ne croisent plus nos routes. Se meurt notre envie. Ce soir quand se sont enfuis les douze coups de minuit.
Lire la suiteLa maison bleue

Il existe une maison bleue. Se protégeant du vent, des cieux. Là vit un couple de fantômes amoureux. Impertinents et malicieux. Paressant tous les deux. Modifiant le présent d’un simple vœu. Aspirant à un monde merveilleux. Se faufilant entre les murs frileux. Des années, de siècles disgracieux. Sans vieillir, ni être vieux. Leur sang bleu. Bouillonnant dans des veines tempétueux. Le regard vif et langoureux. Berçant leurs illusions en écoutant. La mélodie de leur mélancolie. Glisser doucement dans l’air du temps. Ils ne dorment pas. Ne mangent pas. N’ont besoin de rien. Hantent les nuits. Se faufilent entre les gouttes de pluie. Y noyant les ombres de leurs regrets. Dans le bal effréné de s’enivrer, de tournoyer. Pour oublier. Qu’ils sont enfants du vide, de tout, de rien. Le présent, l’avenir glissant entre leurs mains. Depuis des années, des siècles, c’est ainsi. Se perdant dans l’infini de leur vie. Chaque jour est pareil. Sans sommeil, ni réveil. Les meubles ne changent pas de place. L’instant s’efface. Identique à hier, autrefois. Sans frontière, ni autre loi. Que de tout recommencer en répétant sans se lasser. Le moment, l’inflexion du temps. Capricieux. Modifiant le présent d’un simple vœu. Leur laissant l’unique droit d’être amoureux. Ils en abusent. L’utilisent. Derrière les murs de la maison bleue. Avec le plaisir voluptueux. De pouvoir fermer les yeux. Et de croire qu’ils sont heureux.
Lire la suiteNotre mélancolie amputée

Dans le miroir je cherche notre reflet. Désespérément. Quelque chose, un rien, pour ne pas oublier. Brutalement. Les choses, le temps passé. Absolument. Quand nous avions le plaisir de nous regarder. Amoureusement. Un sourire, une moue, pour se taquiner. Langoureusement. Les caprices de nos vies à s’apprivoiser. Jouant. Entre nos ombres assumées. Parfaitement. On aimait se cacher. Malicieusement. A côté du miroir faussant son reflet. Fatalement. Pour refuser, conjurer l’idée. Arrivant. Qu’un jour tout pourrait s’arrêter. Irrémédiablement. On se faisait peur pour mieux se retrouver. Tendrement. L’un à l’autre collés. Imparablement. Ne faisant qu’un dans le reflet. Convulsivement. Nos couleurs celles de l’été. Chaudement. On parlait, on rêvait. Passionnément. De tout, de rien, sans s’inquiéter. Tranquillement. Le monde nous appartenait. Doucement. J’aimais t’observer. Détaillant. Les courbes de ton visage émerveillé. Irradiant. L’image, le reflet. Envoutant. De toi, de moi enlacés. Se tenant. Courbés contre le poids des années. S’enfuyant. Nos pieds sur le bûcher. Brûlant. Nos secondes, nos heures, nos années. Imparablement. Sans parvenir à retarder. L’instant. Venu nous séparer, nous écarteler. Furieusement. Dans le miroir je cherche le reflet. S’endormant. De notre mélancolie amputée. Coupant. Le lien qui nous unissait. Totalement. Il ne reste que des souvenirs morcelés. S’éparpillant. Dans le brouillard du reflet. Enfermant. Nos rêves recroquevillés. Envoutant. Mon esprit dans un appel désespéré. T’appelant. Au-delà de la nuit arrivée. Obscurcissant. Le miroir de notre passé. Définitivement. Pourras-tu l’écouter. Murmurant. Les phrases de notre plus grand secret. Jurant. De ne jamais s’oublier. Promettant. De toujours s’aimer.
Lire la suiteDeux

Il y a le son de ce concerto qui revient. Inexorablement dans ma mémoire. Tu le joues à deux mains. Il s’étend dans l’air du soir. Parfois enjoué, triste, les deux à la fois. Rejoignant les fissures du temps. Je ne sais plus si tu existes… Je t’ai imaginée ou inventée. Peut-être les deux ? Cette image qui résiste. Ancrée en moi à jamais. Heureux ou malheureux ? Tu es au cœur de ma mélancolie. Nous allons ensemble la nuit. Pas à pas tous les deux. Sans parler juste à nous écouter. Entre les arbres pliés. Dans ma mémoire, il y a le vent et la pluie. Allant deux par deux. Dans ma mémoire, tu emportes mon désespoir. Tu as cette force, je te l’ai donnée. Tu m’as fait ce don de l’accepter. Il est rouge et noir. En lettres de sang sur papier de cendres. S’envolant au vent. Doux et tendre. Mouillé par la pluie. Conjointement, tous les deux. Ainsi, nous sommes amis. Désireux de se protéger quand nous serons vieux. Dans ma mémoire, tu n’as pas de visage. Tu es belle, éternelle. Cela suffit à mon envie. Nous deux. A s’aimer, j’en fais le vœu. Platoniquement, ardemment, inlassablement. Dans ma mémoire, il n’y a pas de promesse. Des certitudes que je t’adresse. Il y a des nuits infinies. Que l’on traverse et que l’on transperce. Sans casser les fils du temps. Sans briser notre serment. Ensemble tous les deux. Veillant sur les bougies de ma mélancolie. La lueur qui me lie à toi fragile et frileux. Imperceptible comme le son de ce concerto qui revient. Inexorablement dans ma mémoire. Me donnant la force d’ouvrir les yeux jusqu’à demain. Mon espoir porté entre tes mains. Tu as cette force, je te l’ai donnée. Et, tu m’as fait ce don de l’accepter.
Lire la suiteLe signe du temps

Le signe du temps porte l’écho de mots muets. N’a pas de nom, personne à l’attendre, personne à chercher à le comprendre. Orphelin, abandonné. Le signe du temps frappe les langueurs du soir. Possède un corps d’acier fait pour endurer. A ses pieds dort un cortège de chats noirs. Sans espoir, ni désespoir. Répéter, entêter pour ne jamais l’oublier. Sans remord, se jouant de la vie, de la mort. Se flagellant le corps. Par pénitence, acceptant la sentence. Plus fort que les éclairs qui illuminent la mer. S’immisçant dans les courbures du vent. D’une onde langoureuse, cajoleuse. En haut d’un clocher. Dans un nid d’abeilles pour se protéger. De sorts jetés aussi forts que respire son cœur d’acier. Endormant, réveillant. Jouant la même partition. Jamais à cours de munitions. Le signe du temps n’a pas de sexe. Féminin, masculin. Sans complexe. Domine le monde. Uni à lui en faisant la ronde. Contraint et forcé. Pour se repérer. Ne pas s’égarer. Se rencontrer au bon moment. Le signe du temps possède un pouvoir exorbitant. Rien ne peut le compromettre. Fait pour être. Sans besoin de conquête. Chaque jour est jour de fête. Écrasant, morcelant les instants. Impossible de lui échapper. Entre ses griffes emprisonné. Il n’y aura jamais de libération. Il restera là. Sans concession. Sachant qu’on l’écoutera. Esclaves condamnés pour l’éternité. Muselés dans un cœur d’acier.
Lire la suiteUne sourde mélancolie

La sourde mélancolie de ton éternité. Les transes des sursauts de tes sanglots. La douleur brutale de tes fureurs. Bercent les faiblesses de mes infirmités. Composant les phrases mot à mot. D’un monde fragile et morcelé. Où se miroitent dans la nuit de nos cimetières. Les nervures d’une obsession passagère. Ondulant dans le labyrinthe d’un château sans vie. Investi de corbeaux et de fantômes. Comme le bilan et la somme. D’un infini. Oscillant entre le vrai et le faux. Faisant tomber le rideau. Sur les grimaces de pantins tristes et gris. Dont les ficelles pendant au bout de tes doigts. Suivant ta foi et tes lois. Dans la sourde mélancolie de ton éternité. Je m’approche et te crie de te réveiller. Entre passion et raison. Tu n’es qu’un mirage, une obsession.
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