Au bout du monde, il y a une poignée d’arbres. De la neige, le brouillard, un sol dur comme du marbre. Au bout du monde, il y a l’écho d’un piano. Le lent mouvement d’un adagio. Une meute de loups. Se regardant le regard cruel. Murmurant des mots fous. Dans le langage éternel. D’un duel entre le bien et le mal. Au bout du monde, il y a le silence létal. Qui endort aux portes de la mort. Les mains et les pieds froids. Le vent qui a tous les droits. Mordant, enivrant les derniers vacillements. Au bout du monde, il y a l’impossibilité de voir. Si le blanc de la neige masque les rêves noirs. Habille le brouillard de hasard. Sans chercher à vouloir. Faire l’effort de savoir. Plissant les yeux en s’aveuglant du néant. Au bout du monde, il y a l’absence. Tombant violemment comme une sentence. L’attente et son insolence lancinante. A regarder des arbres figés. Las d’être observés. Par tous ces gens dans l’impasse. Devant ces choses qui les dépassent. Au bout du monde, il y a la folie de vouloir y aller. Pour y trouver. L’unique envie de s’en retourner. Vivre pour fuir. En ayant vu le pire. Au bout du monde, il y a le chaos. La pesanteur d’un infini que rien ne distingue du laid, du beau. Cette impression de résignation si proche du néant. Qui brûle en dedans. La répétition d’une régression. Portée par l’écho d’un piano. Le lent mouvement d’un adagio. Au bout du monde, il y a la peur. D’avoir commis une erreur. L’étouffante oppression d’une obsession. De courir vers l’infini de s’y fracasser. Pour avoir mal et exister.