Le tic tac du temps bat lentement. En attente de toi, devant la fenêtre. Noire, seule ouverte. Le tic tac du temps frappe patiemment. Alors qu’en moi s’accélère la montée d’un violent énervement. Que je ne puis contrôler. Je hais cette maison devant laquelle j’ai si longtemps patienté. A espérer. Que tu sortes de ce repli dans lequel tu t’es emmurée. Provoquant mon impatience, seul face à cette fenêtre toujours ouverte me rappelant ta présence. Je ne sais plus qui tu es ? Ma lassitude, mon amertume suintent sur l’ennui de tes murs. Je ne suis plus certain. De t’aimer, de vouloir patienter en attente de toi chaque matin. Le tic tac du temps me lasse infiniment. Glissant dans la gorge du sablier ces grains de jours, ces secondes emportant ma frustration. Ma déraison. Je n’ai plus de mots à te dire même si tu te présentais. Je n’ai plus d’admiration. Je viens par habitude, par répétition. Faisant de mon déplacement devant ta maison le pèlerinage de mes années fanées. Pour les avoir gâchées à t’attendre, toi le fantôme de mon passé. Le tic tac du temps m’accable imparablement. Me rappelant chaque jour que je me traîne un peu plus pour passer devant ton balcon, je suis las. De lever la tête pour espérer que tu ne sortes pas. Car maintenant, je le sais, je viens pour te détester. J’ai tant de haine à te jeter. Trop tard, j’ai compris que ta fenêtre ouverte est ce piège dans lequel tu m’as emprisonné. J’ai mis tant d’années à le comprendre. Il a fallu accepter que ma raison s’enfante de nos cendres. Dans lesquelles sont venues se consumer nos heures tendres. Le tic tac du temps se ralentit misérablement. Sur ce voyage sans fin que je fais chaque jour. Comme un dément. Tournant en rond dans les rues de la cité fou d’amour. Ivre de toi, saoul de ne plus trouver de sortie à ce labyrinthe qui me mène jusqu’à toi. Pour t’aimer, te crucifier, sans retenue, sans foi, ni loi. Entre joie et peine, rancune et lassitude, prêt à mordre dans nos souvenirs pour en sucer leurs dernières gouttes de mémoire. Celles que j’ai conservées pour fêter ce jour funeste où j’aurais enfin la force de ne plus venir te voir. Mais, je me mens. Tout le temps. Pour ne pas mourir. Le tic tac du temps se répète magnétiquement. Sans que je puisse agir. Sur le fil des ans s’enfuyant irrémédiablement. Jusqu’à ce que je sombre. Comme toi égaré, invisible, évaporé, inaccessible. Te retrouvant à jamais oublié dans le royaume des ombres.