Je vais t’écrire un message lunaire. Que tu liras dans la lande austère. Là où nous allions tuer le lion. En regardant s’en aller la cohorte de nos légions. Tandis que bruissera la rumeur de quelques notes. Provenant de nos complaintes, de nos peurs idiotes. Devant l’impuissance de ne pouvoir contracter. Le temps, ses mirages, l’espace d’un instant.
Je te parlerai de l’inutile. Par provocation, par hésitation. En croyant qu’il est facile de concilier le futile. Avec nos urgences omnivores. Leurs crocs mordant à mort. Dans le bouclier tendre d’un cœur à fendre. Comme du vieux bois mort. Prêt à se briser, prêt à brûler. Dans l’âtre d’une quelconque cheminée. En s’évaporant vers l’éternité.
Je sécherai tes larmes. Avec des mots indigents voire même prudents. Pour ne pas violenter la mélodie défragmentée. Vierge et luttant sans arme. Devant tes rêves inachevés et oubliés. Où sont passées ces espérances s’extirpant de l’adolescence ? Tes oriflammes en tête du cortège. De tes conquêtes programmées et effacées. Sous la glace, le froid et la neige.
Je tenterai de souffler le chaud et l’ardent. Capable de réconcilier autrement. La crainte idiote d’avoir tout manqué. Ce sentiment atrophiant toute vérité. Venant mordre et empiéter. Les belles lettres d’une légende avérée. Mentionnant le fort et le bouillonnant. Venus te porter et t’emporter. Tout au long de ces années.
Je graverai avec le silex. De nos oppositions exaspérées. Sur la pierre nos anciens réflexes. De se protéger et de s’aimer. En s’opposant, en se jaugeant. Pour s’amuser et alimenter. Dans le foyer la haine de s’étioler. Comme si elle n’était pas une fatalité. Venue nous accompagner, nous éprouver. En tapissant nos murs de fractures. Ayant forgé nos armures.
Je policerai les remparts de nos forts. Là où nous nous protégions avec nos hallebardes. Là où nous nous cachions du triste sort. Face à ces humeurs pesantes et blafardes. Quand l’aube divorçait de la nuit. Et que le froid dictait sa loi. Sur la tiédeur de nos corps lourds. Ainsi nous parlions du présent comme toujours. En hésitant comme si nous parlions d’amour.
Je jouerai avec les mots. Par des accords et des rimes improbables. Afin d’écrire ou de traduire. Le murmure insolent du ruissellement de l’eau. Tatoué sur notre peau comme une fable. Inacceptable et vulnérable. Psalmodiant le bégaiement de nos jours lancinants. Dans la lande austère. Là où nous allions tuer le lion. En regardant s’en aller la cohorte de nos légions.