Le rendez-vous crépusculaire

Chaque nuit glissant sur les lattes du parquet. Je regarde la lumière de lune scintiller. J’écoute le silence muet, caresse son infirmité. Tous deux emmurés dans un château évaporé. Là-bas sur les terres d’un hiver gelé. Ayant prêté au néant allégeance et fidélité. J’erre dans les couloirs abandonnés. Pose mes mains froides sur des vases chinés. M’évade dans la conquête de fresques dessinées. Libère mon esprit vers le ciel étoilé. A la rencontre de poètes éméchés. Imprimant leur ivresse sur des feuilles de papier. En mots abîmés, maintes fois raturés. Si souvent utilisés, tant de fois répétés. Leur sacrifice ne m’arrache aucune pitié. Je bois le calice de leurs vertiges frelatés. Pour m’absoudre de la tentation de les renier. Il ne me reste qu’eux pour me rappeler. Ces soubresauts d’un lointain passé. Quand mon verbe portait la promesse de l’instantané. J’étais vivant, présent, enflammé. Courant sur les lattes du paquet. Le martyrisant de mes pas pressés. C’était hier, avant, j’ai oublié. La couleur de la passion émerveillée. Le reflet d’un regard embué. La saveur des noies tombant du noyer. Mon corps est sec, s’est émietté. Je songe au regard que tu porterais. Sur ce profond laisser aller. Tu me dirais de me relever. De courir et te retrouver. Dans tes bras ouverts. Toi mon rendez-vous crépusculaire.
Lire la suiteNos espoirs sont gris

Et, si je te parlais d’éternité pour te séduire ? Et, si je te mentais sans arrêt pour te conquérir ? Chargé de ce fardeau qui marque notre peau. Comme l’arlequin de ses teintes multiples. Nos espoirs sont gris, nos peurs triples. Dans le cauchemar crépusculaire s’agglomère le calcaire. Fossilisant le bassin où convolent des poissons rouges. Sang comme la couleur des coquelicots. Du champ de nos amours qui furent si beaux. Ils frétillent, ondulent et bougent. Après ne restera que pourriture et asticots. Puis l’oubli se badigeonnera de mélancolie. Dans un champ aux herbes sèches et jaunies. Et, si je te parlais d’éternité pour te séduire ? Et, si je te mentais sans arrêt pour te conquérir ? D’une larme affable et choisie. D’une parole aimable et jolie. Ces artifices, mes complices. Magicien de tous petits riens. Dans la dérive des continents de nos âmes. Je demeure le gardien de tes peurs. Cachés derrière mes mots, ma flamme. Prophète d’un monde inabouti. Je regarde voler les mouettes. Admire leurs arabesques abouties. Passant au-dessus de nos têtes. Reviens ce refrain qui m’entête. Il parle d’une faiblesse, d’une bagatelle. Avec les mots d’une ritournelle. Et, si je te parlais d’éternité pour te séduire ? Et, si je te mentais sans arrêt pour te conquérir ? Loin de chez nous. Loin de ce monde de fou. Où nos caricatures sont immatures. Où nos cœurs se chamaillent. Pagaille qui nous asphyxie. Intempestive et intrusive. Éventrant nos viscères. Arrachant nos vies. J’entends tes murmures, tes prières. Brisant les pierres du mur. Bâti autour de notre futur. Et, si je te parlais d’éternité pour te séduire ? Et, si je te mentais sans arrêt pour te conquérir ?
Lire la suiteUne amertume

Bat dans ton cœur le rejet violent d’une amertume. Ce petit bout de rien qui étend ses tentacules. Et fait poser sur tes horizons ce voile impénétrable de brume. Effaçant le feuillage et les fleurs où volent les libellules. Donnant aux ombres le droit de maquiller tes songes. Dans la lande de ces cauchemars qui rongent. Le temps, le moment, l’instant, pendant. Que ruisselle sur le suaire les prières. En lettres de sang coulant du néant. Alors tu te plais à lui donner un nom. Noir comme la couleur d’une peur. Noir comme l’absolution d’un désespoir. Dans la cathédrale du recueillement interdit. Là où luisent les bougies de ta mélancolie. Et tu regardes se refléter dans le miroir. La procession de spectres tristes et silencieux. En route vers de sombres territoires. Marchant sur la braise de feu. J’ai rêvé de toi dans la pensée complice. D’atténuer tes peines, de mettre fin à ton supplice. J’ai pensé à toi mais cela m’est interdit. Tu es vent, dans l’impossible dénuement de ma folie. Tu es tempête sous les nuages crépusculaires. De mon abandon à cette idée stupide et vulgaire. D’être un invisible bonimenteur qui joue avec tes peurs. Ce petit bout de rien qui étend ses tentacules. Et fait poser sur tes horizons ce voile impénétrable de brume. Effaçant le feuillage et les fleurs où volent les libellules. Alors que bat dans ton cœur le rejet violent d’une amertume.
Lire la suiteSur les feuilles des arbres

Ainsi vaque le temps d’un élan. Au-delà des vagues cependant. Durant le caprice d’un moment. Instant fugace et complice. Au firmament de tant de malice. Je tire les fils de notre avarice. Pantins dansant dans le matin. Sur le miroir aux reflets sans fin. De nos corps vaporeux et morts. Sans regret, ni remord. Légers et forts. Je bois l’air ivre. Titube dans l’agonie. De l’abandon qui délivre. De cette nuit qui s’enfuit. Du cauchemar infini. Dans le labyrinthe malin. Ses toiles d’araignées. A nos mains collées. Les yeux clos et emmurés. Je sais rencontrer ailleurs. Les ombres magiques. Dansant au-delà de nos peurs. Apaisant du baume bénéfique. Les cicatrices profondes et tragiques. Ces traces du parcours de nos vies. Entre des pieux ensanglantés et pourris. Ces écueils ouvrant la porte du cercueil. Là-bas dans le brouillard. Dans les vapeurs du hasard. Je crois en cette alchimie. Pierre philosophale d’une cacophonie. Entre l’espoir perdu et revenu. De te revoir apparu. Balayant hier, effaçant l’amer. D’un rayon de lumière. Sur les feuilles des arbres. Une façon d’être sans manière. Fraction gravée dans le marbre. Épitaphe sans concession. Sur la pierre du cimetière. Où sont enterrées nos passions. Ainsi vaque le temps d’un élan. Au-delà des vagues cependant. Durant le caprice d’un moment. Instant fugace et complice. Au firmament de tant de malice.
Lire la suiteLa cathédrale de sel

Je me souviens de ce livre aux pages jaunies et écornées. Ses lettres calligraphiées à l’encre noire et saturée. Un texte qui s’étire dans le temps et un peu plus loin. Ses mots teintés de nostalgie et de mélancolie. Une histoire d’amour, de remords, et du lointain. Triste comme un vague à l’âme et cette souffrance qui subsiste. Là, maintenant, depuis si longtemps et ne m’abandonne pas. Vivace avec cette force que rien n’efface. Tapie dans l’ombre des recoins de ma vie. Enfantant le corps et les vapeurs de mes rêves. S’étirant dans le couchant et sur la grève. Je les regarde s’entremêler dans les phrases du livre. Portés par des sentiments et une sensation qui m’enivrent. Et je titube, m’accroche aux branches des arbres. Dans la caverne fleurie de roses tombant éparses sur le marbre. Je t’appelle, je crie dans le vide frappant l’écho infini. Il m’ensorcelle, écorche les lettres de ton prénom que j’épelle. Sous la protection là-haut dans le ciel d’un chandelier illuminé. Dessinant des étoiles, un chemin vers la voie lactée. Me montrant la direction à suivre dans la cathédrale de sel. Creusée avec les années pour conjurer la fatalité. Et je sais que dans le repos me sera offert une poussière d’éternel. Je prends cet espoir comme la bougie qui va éclairer. Mes pas dans le labyrinthe s’enfonçant vers l’éternité. Une dérive entre les pieux où sont éventrés mes fantômes. Une progression que j’effectuerais avec les craintes d’un môme. Passage obligé pour renouer avec l’histoire du livre. Présent et qui me hante, j’avancerais titubant et ivre. Il y a dans ses mots tant d’ombres et de lumières. Ces obstacles tendus devant mes pas. Je les franchirais, je les éviterais ou pas. Si, tu m’en donnes la force ou pas. Et, il restera dans ce mystère un dernier chapitre. Nos retrouvailles pourraient en être le titre ?
Lire la suiteUne nuit de neige

Dérive d’un nénuphar sur les ondes d’une mare. Alanguie s’endort sur l’eau la feuille flétrie. Se courbent les roseaux aux bords des canaux. Souffle le vent d’un hiver mordant. Se penchent les arbres et craquent leurs branches. Sous le ciel noir d’une pénombre surnaturelle. A l’approche d’une nuit aux tentacules infinies. Pleure ton âme fracturée de s’être fait voler. L’or et le miel de ces rêves qui te rappellent. L’été, la tendresse, la chaleur, la caresse. D’un temps posé et oublié maintenant. Tête courbée tu avances contre le froid et son arrogance. Sur une terre blanche de neige recouverte par le sortilège. D’avoir répudié la mère nourricière de plaines ensoleillées. Il ne reste que le souvenir endeuillé de s’émietter dans des soupirs. Et, je regarde la pénombre dans laquelle on sombre. Dans les yeux, valeureux comme deux vieux. Faisant des projets les sculptant en forme de jouets. Pour rappeler l’enfance, réveiller l’indolence. Sans parvenir à tromper ni à faire mentir la réalité. De cet instant, la violence de ce moment. En forme de solitude, résigné à tant de lassitude. Dans l’effacement d’une errance ouvrant lentement la dépendance. A cette profonde mélancolie qui doucement nous envahit. Transis l’on avance rabougris sans espoir de délivrance. Cette marque de vieillesse qui n’a aucune forme de sagesse. Et alors qu’il nous reste l’or. De déambuler sur un tapis de feuilles mortes et de s’aimer. Pour se sentir forts pendant que se fige et dort. L’instant, le moment. Je pense à notre nature de faire que cet artifice dure. Et qu’il ne s’arrête jamais pour ne jamais être séparés.
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