Devant le décor de théâtre d’une maison abandonnée. Pour le texte d’une pièce de peu de mots, aux phrases inachevées. Que personne ne viendra prononcer. Absence meurtrie d’une totale inutilité. Polluée par le passage des voitures, des camions sur la chaussée. Quelques piétons pour regarder. Des vieux déséquilibrés se tenant aux grilles. Sous la gifle d’une pluie brûlant de rouille les persiennes. Sous le souffle d’un vent cinglant s’enroulant autour des encorbellements. Dans un cri lancinant. Longues traînées sombres du dégout de l’abandon tâchant les murs de l’ennui. Sculptures veillant sur le silence du vide jusqu’au bout de la nuit. Lugubre. J’ai pensé à toi. Devant cette façade au maquillage de pierrot triste. J’ai pensé à moi. A la futilité de nos destinées. Aux efforts qui ont émaillé la construction de cette maison. A l’énergie déployée. Aux rêves, aux joies qui l’ont portée. A ce jour où la porte s’est refermée. Derrière s’est engagée le dernier grain de sable dans le sablier du temps. Tombant lentement. S’écrasant violemment. Lézardant. Fissurant. Plongeant dans le noir, une histoire. Avec personne pour s’y intéresser, s’en souvenir. Pas même un soupir. Juste une présence. Celle de l’absence. Devant le concert de chaque jour. Demain, ce sera notre tour. Il restera toujours. Cette absence meurtrie d’une totale inutilité. Polluée par le passage des voitures, des camions sur la chaussée. Quelques piétons pour regarder.Un chat pour miauler. Conter le texte de cette pièce de théâtre qui fut tienne. Qui fut mienne. Résumée en un titre. Notre vie.