Il y a les voitures qui passent dans un va et vient lancinant et engourdissant. Une nuit qui s’étire lentement en écoutant les chuchotements. D’anges qui veillent là haut sur les poutrelles. Que personne ne voit, si ce n’est toi, sensation qui t’ensorcelle. Depuis si longtemps. Tu sens les vibrations du temps. Ces ondes qui te transpercent, te dépècent. Ombre au corps invisible que les lumières de la nuit caressent. Tu voles et tu planes d’un battement d’aile. Au-dessus du pont que je traverse en allant à ta rencontre. Avec cet espoir de te voir ici bas où là haut dans le ciel. Sans écouter l’heure qui bat au poignet de ma montre. Ni m’apeurer aux tremblements du pont sous le passage des camions. Il y a cette parenthèse dans la nuit que tu viens d’ouvrir, le bruit s’endormant, emportant la frénésie et la folie. De ces journées agitées où je sais jamais te trouver. Coulent les eaux paisibles d’un fleuve calme avant qu’il ne pleuve. Au loin s’amoncellent les nuages d’autres tensions rebelles. Celles qui peuvent te faire fuir. Coups de tonnerre qui me font tressaillir. Arrachant une larme à l’ultime serment. Il y a les voitures qui passent dans un va et vient lancinant et engourdissant. Endiablant une étrange mélodie frappant aux portes de la mélancolie. Les couleurs blanches et froides de la nuit volant à la lune sa présence, ses silences, sa désespérance. Je marche à ta rencontre, je t’attends. Pour un autre rendez-vous sur les arrêtes de nos promesses. Là où a basculé ta vie sous le souffle d’un vent qui ne cesse. De t’emporter, moi voulant te rattraper. Pour une dernière fois partager nos paroles, nos secrets. Souffle cette tempête qui se répète, que rien n’arrête. Qui m’entête. Sur le pont ou ailleurs, un jour, une nuit, à toute heure. Maquillant l’image qui s’érode du fantôme de nos peurs. Celui qui t’a pris par la main, t’emmenant au-delà d’un mur sans fin. Qui continue de s’allonger alors que mes pas pour le contourner sont vains. Je le crains. Reste cet espoir qui me retient. Que la nuit et ses lumières fabriquent à la pointe d’un fusain tragique ou diabolique. De te voir sortant du noir. Habillée d’un voile magique. Sous lequel ne pénètrent ni la vie et la mort, vaincus l’un et l’autre par le sort. Que mes yeux se ferment sur ce rêve alors que je m’endors.