A la mort de la nuit, au lever du jour, brille fugacement une lueur le temps d’une mesure. Portée par le chant d’un chœur introduisant le Requiem de Mozart. Emprunt d’une tristesse qui dure. Alors que dans nos cœurs coule le nectar. De ces longues heures d’obscurité où nous nous sommes lovés. Protégés par le silence, abandonnés dans le confort de canapés, écoutant les bruissements de la nuit nous recouvrant. Toi et moi, nous levant pour jeter les cartes de nos jeux sur le velours de la table nous séparant. Pendant que dehors le froid s’étend dans la blancheur d’un givre s’épaississant. Nous regardant le visage éclairé par les reflets de la lune. Ses rayons s’en allant chercher fortune. Dans le miroir des carreaux de cette fenêtre recouverte de glace, ouvrant nos regards sur l’atmosphère d’un matin d’hiver. Plus tard que la nuit qui a conservé la douceur de notre chaleur. Brille fugacement une lueur le temps d’une mesure. Blanche, sinueuse, s’étalant capricieuse. Dans le ciel, sur la table, sur nos mains, refroidissant la température. Toi frissonnant, moi m’approchant. Sans nous regarder, sans nous parler. Juste alanguis amoureusement. Caressés par le lever du matin. Observant la nuit s’endormir, le jour le remplacer, appelant un lendemain. A notre soirée qui s’est éternisée. Que nous avons étirée jusqu’aux confins. De ce jour où brille fugacement une lueur le temps d’une mesure que nous délaissons comme une flétrissure. Laissant au jour son royaume, ses fantômes. Les nôtres n’ont pas d’ombres. Comme nous, ils vivent dans la pénombre. Attendant cette lueur qui brille le temps d’une mesure. Unique moment où comme eux nous existons. Portés par le choix de voir encore le jour se lever sur nos nuits. Terrible frisson. Enivrant, stupéfiant qui nous apporte la force de ne pas sombrer au fond d’un puits. A la mort de la nuit, au lever du jour, pendant que brille fugacement une lueur le temps d’une mesure. Portée par le chant d’un chœur introduisant le Requiem de Mozart. Emprunt d’une tristesse qui dure. Alors que dans nos cœurs coule le nectar. D’être ensemble si tard. Réunis dans une passion qui cogne comme les notes hachées d’une fanfare. Nous n’avons plus de corps, nous sommes morts. Mais, il reste les yeux de nos souvenirs pour retranscrire. La douceur des choses qui ont ensoleillé nos vies passées comme ces petits matins où brille fugacement une lueur le temps d’une mesure. Arrachant les barreaux à nos murs. Projetant nos espérances de liberté s’en échappant, leur doux murmure. Un jour ou l’autre à la mort de la nuit, au lever du jour, brillera longuement une lueur brisant l’amure du temps, je te l’assure. Nous serons là à l’observer avant de fuir avec elle à jamais.