Oublier ? Effacer ce qui nous restait pour mieux recommencer ? Sans retenir les leçons du passé. Plus loin que la mémoire ne s’efface. Oublier ? Ces remords qui nous enlacent. Brisant nos carcasses moins fort que la vraie menace. De ne plus avoir d’histoire. Pour avoir oublié. D’où nous venions; de si loin perdus dans le noir. Au cœur d’une forêt à chercher le chemin d’une possible réconciliation. Faîte d’hésitation, de perversion. Pour savoir qui sera le plus fort ? Avant de découvrir que nous avions tort. De nous être abandonnés dans ce labyrinthe de contradictions. J’en ai ce matin la conviction. Je ne veux plus oublier. Tout laver. Faire semblant de recommencer. Niant le passé qui nous a fabriqués. Traçant la marque indélébile de nos destinés. La notre était de nous rencontrer. De nous aimer. Quitte à surmonter tant de difficultés. Sans nous échapper. Courant entre les ronces et le blé. Vers le bout du chemin où tout deviendra félicité. Je ne peux abandonner. Ce qui nous a forgés. Car j’aurais simplement oublié. Par facilité. Barrant d’un trait de plume. Sur la peau du livre de notre histoire. Le faux et le vrai de notre passé que j’assume. Pour toi, il est le venin qui chaque jour étouffe un peu plus ta conscience du bien. Sans autre devoir. Que de t’engager sur un autre chemin. Oubliant ce que nous aimions. Détruisant les allées d’où tu venais. Sans jamais te retourner. Mettant un terme à toute passion. Oubliant pour toujours. Qui tu avais été. Un être d’amour. Oublier ? Je ne peux, je ne veux le faire. Allant tous deux jusqu’en enfer. Rongés par cette impossibilité de comprendre pourquoi nous sommes encore réunis ? Derrière les visages vides d’un souvenir évanoui. Masquant l’absence infinie. D’une histoire à jamais enfuie. Oublier ? Pour ressembler à ce que nous avions toujours détesté. Le silence entre deux êtres. Portant les chaînes de l’ennui. Comme unique lien les ayant toujours unis. Oublier ? Le son des tes mots, la couleur de ta peau, l’éclat de tes yeux. Capricieux, amoureux. Oublier ? Non, jamais. Pour trahir ce que nous avions été ? Faire semblant d’exister. Maintenant. Demain. Tout le temps. Avec cette entorse au passé. Plus forte que la culpabilité de ne prendre ta main. Sur ce chemin où l’on dit que la vie sera plus belle chaque matin.