Aveugles et sourds

Sur la tombe de nos sorts gémit la douleur de nos corps morts. Sombre et tenace comme la liane qui s’enlace. Aux bras multiples et vivaces. Arrachant dans nos chairs les lambeaux putréfiés de cette fatalité.Elle a perdu la vie. Elle incarne ce passif.Plus mort que vif. Flirtant avec les rives de l’infini. Avec pour épitaphe des mots gras. Chargés de l’odeur rance de nos péchés. Gravés dans la pierre du glaive de nos infirmités. S’alignant un à un pour rappeler. Qu’il y a plus à oublier qu’à pardonner. Je frisonne. Tu tâtonnes. Dans le noir torride de nos soirs. Où cheminent deux par deux nos regrets. Sans bouche à bouche pour les réanimer. Nos squelettes enlacés pour se protéger. Du froid que l’on ne ressent plus. De ces soleils que l’on ne voit plus. Nous aveugles et sourds pour toujours.
Lire la suiteVoyeur

Voyeur de tes ébats, de tes lenteurs. Doucement bat ton cœur. Les pieds nus sur le parquet. Ballerine aux pas muets. Dansant en pleurant. Hoquetant en trébuchant. Les bras écartés. A maintenir l’équilibre envoutant. De ne pas chuter. La robe se liant. Autour de ton corps. Ensorcelant ce moment. Vivant ou mort. Je ne sais plus. Maintenant ou hier. Il y a si longtemps. La douceur de ta peau nue. Au goût sucré ou amer. Un souvenir inanimé. Des ébats oubliés. En croyant te voir danser. Au travers d’une fenêtre vague silhouette. Les yeux à rêver. Pauvre marionnette. Les fils accrochés à ton cœur. Dans le mouvement saccadé. De tes pas, de tes peurs. Tu ne m’entends pas. Tu ne me vois pas. Impuissant, je suis là. Voyeur de tes ébats, de tes lenteurs. Tu es emportée, ensorcelée. Vers un autre ailleurs. Émiettée, morcelée. Je te vois t’effacer. Comme si tu n’avais jamais existé. Je ne peux te retenir. Croire que je t’ai inventée. Pour ne pas oublier. Te faire revenir. Tricher avec le passé. Le déformer pour le maquiller. De cette danse, toi les pieds nus sur le parquet. Tournoyant pour t’enivrer. Derrière une fenêtre à nous séparer. Sans pouvoir s’approcher, ni se parler. Voyeur de tes ébats, de tes lenteurs. Ta vie à l’intérieur. La mienne à l’extérieur. Maintenant, tout le temps. A jamais, pour l’éternité.
Lire la suiteEnnui

Infinies comme des gouttes de pluie sur une feuille qui plie. Je veux te parler ici d’un lieu où mes pas m’ont conduit. Les reflets d’un lac sous les clapotis. L’image trouble et affadie. De ce présent dans les bois à l’arrivée de la nuit. Les fleurs qui se lassent, se délavent sous la pluie. Le vent devenu calme et assagi. Je marche entre des arbres aux troncs noircis. Ombres rigides dans le mausolée d’un printemps reverdi. Traînent paresseuses les ombres d’une angoisse meurtries. Dans le silence pesant d’un ciel qui s’obscurcit. Se morcelle alors la déliquescence de mon ennui. Je pourrais y trouver une once de poésie. Douce emprunte de mélancolie. Cherchant la torpeur et la candeur d’une âme endormie. S’évaporant dans le brouillard qui s’épaissit. Je t’appellerai au secours pour que tu me ramènes à la vie. T’offrant en échange le goût des fruits interdits. Avant tu auras lu le texte où il est écrit. Que nos pas marchent sur les traces de notre nostalgie. L’époque où nous vivions entre les murs d’un paradis. Vague souvenir dont il ne reste aujourd’hui. Qu’un ennui infini écrasant la feuille qui plie. Le poids lourd des larmes de nos pluies. Une à une les gouttes avachies. Passent dans le sablier d’un temps affadi. Toi et moi, métronomes de nos instants inaboutis. Là, va mon idée de nous, une vue de l’esprit. Ce soir au travers du brouillard et de la nuit. Entre les arbres où se languit. Ce désir, cette envie, cet infini. De tuer mon ennui dans l’éclat de ton visage qui rit.
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