Je voudrais me souvenir de ces mots qui nous faisaient frissonner. Assis sur la plage, devant la mer écumante. A jouer à se faire peur. Jusqu’au bout de la nuit. Balayée par le faisceau du grand phare blanc. S’étalant sur la mer de nuages gris. Tu y voyais la trace de visages du passé. Tu me racontais leur histoire. Faîtes de mots doux aux larmes amères. Dont l’oubli a effacé le son de leurs voix. Il ne reste plus que toi. Pour les faire parler. Sur le ciel d’une partition caressée par le son larmoyant d’un piano langoureux. Il y a aussi un violon qui pleure la solitude de son ennui. Nous étions bien tous les deux. Accolés, l’un à l’autre. Prêts à frissonner. Sous le vent froid venu de l’océan. Il y avait au loin les bateaux qui tanguaient. Dansant sur la plainte de vagues se brisant en écumant. Ta main tendue pour les retenir, les porter. Dans le sable, du bout du doigt, je dessinais le visage de ton âme. Si complexe. Sculpté par les tortures de tes diables. Embrasés dans le feu de tes passions. Je frissonnais. Apeuré. J’étais là aussi pour çà. Pour entendre le hurlement du vent. Sentir le visage brûler par les piqures de sable. Me protéger le long de toi. Aimer çà. Sans comprendre. Sans chercher à comprendre. Jusqu’au bout de la nuit. Au-delà du froid, du sommeil, de cette lutte inexorable contre l’engourdissement. J’ai voulu résister. A tes côtés. Pour voir le premier soleil du monde se lever. Tu m’as promis qu’il allait arriver.